Propriétés thérapeutiques des plantes selon Dioscoride

Matthioli p. 217
Pivoine mâle
Bulliard Tome II
Pivoine officinale
Matthioli p. 218
Pivoine femelle
   

   

   

BIUM - mai 2005

Introduction

 

 

Notre Flore magique et astrologique de l'Antiquité (Belin, 2003) ne contenait aucune illustration, faute de place. Dès lors, le besoin s'est rapidement fait sentir de la compléter par un Atlas réunissant les planches de la plupart des plantes qui y sont citées. La réalisation d'un tel ouvrage nous a été rendue possible grâce à M.Henry Ferreira-Lopes, Conservateur de la Bibliothèque interuniversitaire de médecine, qui a bien voulu nous autoriser à en rechercher et à en sélectionner les gravures parmi les précieux ouvrages anciens conservés à la BIUM qui traitaient de botanique et pouvaient avoir quelque rapport avec notre sujet. Notre choix s'est finalement porté sur les reproductions de végétaux qui accompagnent les Commentaires de Pierre André Matthioli sur le De Materia Medica de Dioscoride, traduits en français par Jean des Moulins, Docteur en médecine et publiés à Lyon en 1572 (Cote BIUM 824). Cette édition contient en effet un très grand nombre de dessins de plantes gravés sur bois, qui nous ont paru presque toujours suffisamment nets pour être reproduits sans trop de difficultés et constituer, une fois réunis et classés, un Atlas susceptible de compléter avantageusement notre Flore.

Pierre André Matthioli (1501-1577) était à la fois médecin et botaniste, ce qui était courant à son époque. On lui doit notamment une Flore médicale (De plantis epitome utilissima, Francfort, 1586) et une traduction du De Materia medica de Dioscoride, médecin grec du Ier siècle après J-C, à laquelle il a ajouté d'importants commentaires.

Ce De Materia Medica se présente comme une suite de notices dont chacune est consacrée à une plante, un animal ou un minéral. Celles qui portent sur les végétaux sont de très loin les plus nombreuses. Elles débutent en général par une description sommaire de la plante, de l'arbre ou de l'arbuste (taille, forme et importance de la racine, aspect et couleur des fleurs, caractéristiques des feuilles, des fruits et des graines….), assez souvent complétée par l'indication sommaire des principales particularités de leur habitat (bord de mer, terrains humides, secs, rocailleux, montagneux…). Elles contiennent ensuite un exposé sur les propriétés thérapeutiques du végétal - ou seulement de certaines de ses parties- ainsi que de brèves instructions sur ses modes de préparation: selon les affections à traiter, la plante devra être séchée, broyée, cuite, bouillie, confite, pilée ou simplement pressée pour en extraire le jus, fumée, grillée, brûlée, voire complètement calcinée et réduite en cendre, et dans certains cas associée à d'autres substances. Dioscoride spécifie enfin comment la plante devra être utilisée (en infusion, en décoction, sous forme d'onguent ….) et quelle est la posologie à respecter (quantité et nombre de prises, durée du traitement).

L'ouvrage du médecin grec fut considéré pendant des siècles comme le traité de matière médicale de référence, car il réunit une somme inégalée de connaissances sur les plantes médicinales qui furent longtemps l'une des principales sources des remèdes.

Son utilisation présente cependant deux difficultés majeures. La première tient à l'identification des végétaux qui y sont recensés, la seconde à celle des affections qu'ils sont appelés à traiter.

Les termes médicaux employés par Dioscoride posent en effet de difficiles problèmes de traduction, d'autant que beaucoup d'entre eux sont de "faux amis" (herpes, anthrax, lichen, emphusêma par exemple) qui peuvent prêter à confusion dans la mesure où ils se rapportent à des affections différentes de celles qu'ils désignent aujourd'hui. Sur ce point, les commentaires de Matthioli ne nous sont d'aucun secours, ses traductions étant guidées par les conceptions médicales de son temps qu'il faut à leur tour interpréter. En revanche, sont d'un intérêt certain les compte-rendus des expériences qu'il a lui-même effectuées sur les malades pour vérifier le bien-fondé et l'efficacité des propriétés des plantes que leur prêtait Dioscoride.

Les identifications des végétaux répertoriés par celui-ci sont une seconde source de difficultés, tout aussi grandes. Les commentaires de Matthioli montrent qu'à son époque, elles étaient déjà loin de faire l'unanimité parmi les botanistes et donnaient matière à discussion.

Ainsi Matthioli n'hésite-t-il pas à rejeter, parfois avec vigueur, celles proposées par certains de ses devanciers ou de ses contemporains, avant de proposer les siennes. Mais, à de nombreuses occasions, ses propres identifications demeurent difficiles à vérifier, car les noms qu'il donne aux plantes ne renvoient à aucune nomenclature botanique de référence, universellement adoptée par tous les botanistes de son temps. Le système linnéen de dénomination des végétaux ne sera en effet adopté que deux siècles plus tard. Les nombreux dessins (il y en a plus d'un millier) qui accompagnent ses commentaires sont d'un précieux secours pour tourner cette difficulté, bien que certains ne soient malheureusement pas toujours suffisamment précis. Aussi avons-nous jugé intéressant de les compléter, chaque fois que c'était possible, par différentes planches d'un autre ouvrage également conservé à la BIUM (Cote BIUM 8338), L'Herbier de France publié en 1780 par Bulliard, qui sont extrêmement détaillées et permettent de mesurer les progrès accomplis dans la représentation graphique des végétaux depuis l'époque de Matthioli.

 

 

Notre Atlas contient ainsi plusieurs centaines de gravures représentant la majorité des végétaux cités dans notre Flore magique et astrologique, classés par ordre alphabétique de leurs noms grecs et accompagnés de leur identification la plus couramment admise de nos jours. Nous avons pensé qu'il pourrait en outre être intéressant d'associer à chacun d'eux une notice contenant un exposé aussi complet que possible des propriétés thérapeutiques que leur prêtait Dioscoride, en nous appuyant sur le texte grec du De Materia Medica publié par Max Wellmann (Berlin, rééd. 1958). Précisons toutefois que ces notices n'offrent qu'un résumé partiel des travaux de Dioscoride. En effet, nous n'y avons pas intégré ses propres descriptions des végétaux, ni systématiquement indiqué quelles étaient les parties des plantes qu'il conseillait d'employer, ni sous quelle forme elles devaient être utilisées, ni le détail des traitements qu'il prescrivait. Car la prise en compte de toutes ces précisions nous aurait inévitablement conduit à publier la traduction intégrale de ses observations et de ses recommandations, ce qui aurait par trop largement dépassé le cadre de cet Atlas. En revanche, à de nombreuses reprises, nous avons fait suivre notre traduction des termes qu'il employait pour nommer les affections par leur translittération, entre parenthèses et au nominatif singulier.

Afin de faciliter les recherches, un index réunit tous les noms utilisés dans l'Atlas pour désigner les plantes.